samedi 9 mai 2009

Lettre au Docteur Barth

Très cher Docteur Barth, 

Je vous remercie de votre lettre du 6 avril, à laquelle je n’ai pu trouver le temps de répondre que maintenant. Vous me demandez de m’engager pour l’autorisation plus étendue du rite romain ancien. Vous savez déjà qu’une telle demande auprès de moi ne tombe pas dans les oreilles d’un sourd, mon engagement dans cette affaire est maintenant connu par tout le monde. 

Est-ce que le Saint Siège à propos du rite ancien “l’autorisera de nouveau dans le monde entier et sans restriction” - comme vous le souhaitez et comme la rumeur s’en répand ? On ne peut pas répondre à cette question de manière absolue. Trop forte est encore chez beaucoup de catholiques - endoctrinés depuis des années – l’aversion pour la liturgie traditionnelle, qu’ils qualifient de manière méprisante de “pré conciliaire”, et aussi, d’un autre côté, beaucoup d’évêques montreraient une opposition déterminée à une autorisation générale. 

La situation est différente si on n’envisage qu’une autorisation limitée; car la demande de la liturgie ancienne est limitée. Je sais que sa valeur ne dépend naturellement pas de la demande, mais la question du nombre des prêtres des et laïcs intéressés a cependant une certaine importance. Une telle mesure ne peut être réalisée que progressivement aujourd’hui, une trentaine d’années après la réforme liturgique du Pape Paul VI. Maintenant il faut avancer pas à pas, chaque nouvelle précipitation ne produira pas de bons résultats. 

Mais je crois que dans l’avenir l’Eglise romaine devra avoir à nouveau un seul rite ; l’existence de deux rites officiels est dans la pratique difficilement “gérable” pour les évêques et les prêtres. Le rite romain de l’avenir devrait être un seul rite, célébré en latin ou en langue populaire, mais entièrement fondé dans la tradition du rite ancien; il pourrait intégrer quelques nouveaux éléments, qui ont fait leurs preuves, comme de nouvelles Fêtes, quelques nouvelles Préfaces dans la messe, un Lectionnaire élargi – un plus grand choix qu’avant, mais pas trop - une Oratio fidelium, c’est-à-dire une litanie de prières d’intercession après l’Oremus de l’Offertoire, où jadis il avait sa place. 

Très estimé Dr Barth, si vous vous engagez ainsi pour la question liturgique, vous ne serez pas seul et vous préparez “l’opinion publique de l’église” à des mesures éventuelles en faveur d’un usage plus large des manuels liturgiques anciens. Mais on doit être prudent en n’éveillant pas des espoirs trop forts, des attentes trop grandes auprès des fidèles attachés à la Tradition. 

Je profite de cette occasion pour vous remercier de votre engagement appréciable en faveur de la liturgie de l’Eglise romaine, par vos livres et vos conférences, même si je souhaiterais ici et là plus d’amour et de compréhension pour le Magistère du Pape et des évêques. Que la graine, que vous semez, grandisse et porte beaucoup de fruits pour une vie renouvelée de l’Eglise, dont “la source et le sommet”, son véritable cœur, est et doit rester la liturgie. 

Je vous donne volontiers la bénédiction demandée et je reste de tout cœur 

Vôtre 

Josef Cardinal Ratzinger

 cette lettre avait été publiée en 2003 dans les larmes de St Louis

avec une légère adaptation.

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